La MHE (Maladie Hémorragique Epizootique) : maladie émergente, témoin du changement climatique

Plusieurs cas cliniques de Maladie Hémorragique Epizootique (MHE) sont apparus en France chez des bovins depuis septembre 2023. Initialement localisée dans le Sud-Ouest, la maladie s’est propagée ensuite. La détection de foyers de MHE entraîne des mesures de lutte et de prévention dans les 150 km alentour.

MHE : de quoi s’agit-il exactement ?

Depuis quand existe-t-elle ?

La MHE est décrite pour la première fois en 1955 aux Etats-Unis. Elle migre ensuite en Asie, en Australie, en Afrique (notamment dans le Maghreb) et au Moyen orient.

Les 1^ers cas identifiés en Europe datent d’octobre 2022, en Italie (Sardaigne et Sicile) puis en Espagne, probablement en lien avec la dissémination de moucherons par le vent tunisien. En France, les premiers foyers sont détectés en septembre 2023 dans le Sud-Ouest.

Le lien entre le réchauffement climatique et l’augmentation de l’activité des culicoïdes est fortement suspecté. Des biotopes favorables à l’installation de ce petit moucheron sont identifiés dans toute l’Europe du Sud et notamment dans le sud de la France [1]. Il existe différents sérotypes du virus. En France, la MHE est causée par le sérotype 8.

Quels sont les symptômes ?

Les symptômes de la MHE sont très proches de ceux de la fièvre catarrhale ovine (FCO). Chez les bovins et les cervidés, les signes sont cliniques (visibles) et se traduisent notamment par :

• de la fièvre,
• de l’anorexie,
• des ulcérations du mufle,
• du jetage (nez qui coule),
• de la détresse respiratoire,
• des boiteries.

La MHE est mortelle dans moins de 1% des cas chez les bovins, mais dans 90% de cas chez les cervidés. Les ovins, qui peuvent être contaminés par le virus, le sont en général de façon asymptomatique.

Quels sont les moyens de lutte ?

Il n’existe pas, à ce jour, de vaccin disponible contre la MHE. Immuniser les bovins contre ce virus n’est donc pas possible. En revanche, le traitement des animaux atteints les aide à supporter la maladie et guérir. Les bovins soignés se rétablissent en quelques jours à quelques semaines.

Les suspicions de cas de MHE doivent être signalées au vétérinaire qui établira une prescription adaptée. Les mesures de traitement reposent essentiellement sur la prise en charge de la fièvre et les moyens de lutte consistent au traitement insecticide des animaux contre l’insecte vecteur.

• Le traitement anti-inflammatoire des animaux atteints permet de lutter contre la fièvre, de prendre en charge précocement les signes respiratoires, et de soulager la douleur associée à la boiterie, le cas échéant.
• Le traitement insecticide des animaux est fortement recommandé dès la fin de l’hiver, même hors suspicion de circulation du virus. Son application doit suivre les bonnes pratiques suivantes :
• Respecter scrupuleusement les doses.
• Traiter tous les animaux de l’élevage.
• Renouveler l’application régulièrement.
• Respecter les précautions d’emploi du produit.

A titre de comparaison, ce sont les molécules de la famille des pyréthrinoïdes qui sont recommandées pour lutter contre les insectes vecteurs de la FCO. La deltaméthrine en fait partie. Cependant les médicaments disponibles pour les espèces bovines et ovines n’ont pas d’indications contre les culicoïdes dans leur AMM. Le traitement doit alors se faire selon la prescription du vétérinaire.

• Freiner la propagation de l’insecte vecteur du virus est le seul moyen de prévention possible. Les moyens sont :
• La restriction des mouvements d’animaux
• Le test des animaux par prise de sang
• Le traitement des animaux avec des insecticides

Quelle est la réglementation applicable ?

La détection d’un cas de MHE en France entraine la mise en place d’une Zone Régulée de 150 km autour du foyer. Des restrictions de mouvements sont appliquées pour tous les élevages situés dans ce rayon ainsi qu’une interdiction d’export vers un Etat membre de l’Union Européenne. Mais il existe des dérogations* :

Dans la zone régulée (ZR), mouvements possible vers:

• Un abattoir, une autre exploitation située dans la ZR
• Un centre de rassemblement dans la ZR si les animaux restent ensuite dans la ZR

Sortie de la ZR possible vers :

• Un abattoir avec désinsectisation du moyen de transport sur le lieu de départ et abattage dans les 24h
• Un centre de rassemblement ou un élevage hors ZR si les animaux ont reçu un traitement insecticide depuis au moins 14 jours, accompagné d’une prise de sang négative réalisée 14 jours au moins après le traitement insecticide.

Sortie de la ZR possible pour les animaux de moins de 70 jours :

Vers un atelier d’engraissement fermé (hors ZR) si :

• Désinsectisation des animaux et du moyen de transport avant départ ;
• Destination uniquement à l’abattage après l’engraissement ;
• Désinsectisation du bâtiment de destination avant l’arrivée.

Export vers l’Espagne et l’Italie possible si :

• Pas de signes cliniques ;
• Traitement insecticide 14 jours avant (au moins) ;
• Prise de sang négative ;
• Désinsectisation du moyen de transport.

Quels départements sont concernés ?

À la date du 22 février 2024, 3 919 foyers de maladie hémorragique épizootique (MHE) ont été recensés en France. Ils concernent les 20 départements suivants :

Bibliographie

[1] Tatem AJ. Et al. Prediction of bluetongue vector distribution in Europe and north Africa using satellite imagery. Veterinary Microbiology, 2003.

Note

* La réglementation concernant la MHE évolue fréquemment. Se référer aux dernières informations sur agriculture.gouv.fr

GP-FR-NON-240200064